Archives de Catégorie: histoire

Éclipse du 11 août 1999 : que faisiez-vous ce jour-là ?

Nous avons raconté une jolie histoire collective avec nos souvenirs du 11 septembre, et comme ces jours-ci, on parle beaucoup de l’éclipse (partielle) du soleil à venir vendredi, je me suis souvenue de celle de 1999…ou plutôt celle d’un été il y a de nombreuses années, mais je n’aurais su la dater aussi précisément…1999, peut-être, car je me souviens m’être racontée des bêtises superstitieuses après le violent tremblement de terre quelques jours plus tard à Istanbul ((en fait il a été bien plus mortel hors d’Istanbul, mais dans ma tête, parce que j’y étais, c’est le tremblement de terre d’Istanbul)); mais j’aurais été incapable d’en donner le jour précis. Donc, une première différence avec le 11 septembre. Mais est-ce que le 11 septembre, n’est pas devenu le 11 septembre parce que les Américains ont fait une date icônique du nine-eleven ?

J’étais à Istanbul comme souvent pour les « grandes vacances », entre ma maîtrise de bio et mon DEA de bio, un été un peu glauque où j’avais appris le cancer de mon père « adoptif » qui refusait de se soigner (il est mort en octobre), où j’ai fait une « croisière » en bateau dans le sud de la Turquie (…), et où je n’avais pas eu le courage d’aller jusqu’à Zonguldak où je savais pourtant que l’éclipse allait être totale, parce que c’était une ville qui dans ma tête ne me faisait penser qu’aux mineurs et aux explosions de grisou de mon enfance ((en fait, j’ai sans doute inconsciemment aussi été marquée par les grandes grèves et marches de 1991)), Zonguldak qui est sur le bord de la Mer Noire, à seulement 150 330km ((j’ai toujours pensé que c’était à 150km d’Istanbul, ce qui rajoutais à ma déprime de ne pas avoir eu le courage d’y aller ce jour-là))d’Istanbul, mais je me voyais mal débarquer dans une ville minière seule, je ne pense même pas que j’avais des lunettes spéciales (en tout cas je ne me souviens pas de l’achat ni de l’usage). J’ai regretté de ne pas y être dès le matin du jour de l’éclipse, où j’ai soudain réalisé que c’était trop bête, et pas si compliqué. Et j’ai été complètement achevée quand j’ai su que l’Observatoire de l’Université de Boğaziçi s’était « déplacée » ce jour-là à Zonguldak, point le plus proche d’Istanbul où l’éclipse était à 100%. Ma vie est (aussi) une somme d’hésitations, de flemmes, de ratages et de regrets.

Capture d’écran 2015-03-19 à 10.09.12

Donc bref, voilà pourquoi je me retrouve à Istanbul ce jour-là, et je me trouve sur la Place de Taksim (celle-là même des événements de juin 2013), au coin de la rue Osmanli (qu’on appelle communément Kazancı Yokuşu, notamment quand on parle du massacre de la place Taksim le 1er mai 1977, jamais compris…), peut-être parce que je sors d’un cours de gym dans le feu centre Vakkogym (locaux désormais occupés par TeknoSA)…

Capture d’écran 2015-03-19 à 00.28.31

Je me souviens d’une belle journée ensoleillée, et à l’heure fatidique, une étrange baisse de la luminosité, qui ne ressemblait ni au passage d’un nuage, ni au coucher du soleil, accompagnée d’un rafraichissement soudain de l’air, une atmosphère très bizarre sur la place, comme si tout les piétons((la place était encore très motorisée à l’époque) était au ralenti, à essayer de profiter de ce moment. Je ne me souviens pas d’oiseaux qui auraient arrêté de chanter : je ne suis même pas sûre qu’on entende les oiseaux (les pigeons et tourterelles) chanter en temps normal sur cette bruyante place. Je ne me souviens pas non plus avoir été entourée de gens qui avaient des lunettes : je les aurais sans doute empruntées ?

Aujourd’hui je n’arrive pas à retrouver le % de l’éclipse, mais c’était dans les 95 à 98% il me semble (et 2% de Soleil suffit largement à éclairer une ville, il n’a pas fait nuit, ni même presque), mais en recherchant l’info sur internet, je tombe sur plein de sites qui citent les astrologues : attention au risque de tremblement de terre violent dans les jours suivant l’éclipse, comme en 1999. Quel métier d’utilité publique:)

Si je vous raconte tout ça, c’est juste un prétexte pour vous demander de raconter votre dernière éclipse solaire !
PS. Oui le plugin de notes de bas semble cassé, on s’en occupe demain:)

Tweets pendant que je rédigeais l’article…et après…:

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Qu’a-t-on fait au pont de Mostar ? #histoire #factchecking #internet #wikipedia

Suite à une discussion avec Y. Winogradsky que j’ai connu sur twitter et rencontré hier soir, et en passant par Le Pont sur la Drina de Ivo Andrić [pont construit par l’architecte ottoman Sinan], je me suis souvenue du pont de Mostar dont la destruction en 1993 m’avait beaucoup émue, en ces années où je me révellais tous les matins avec l’édition turque de la BBC et leur inoubliable burasi BBC Londra

Je ne me souvenais plus exactement comment le pont avait été détruit, et comme Google est mon ami, je tombe en 1er lien sur une page de l’UNESCO sur l’inauguration du nouveau pont de Mostar en 1994. On y lit :

Le pont est donc tombé par effet collatéral de la guerre.

Par habitude de consulter Wikipedia, pensant que l’histoire d’un pont ottoman, sa destruction pendant la guerre et sa reconstruction sont typiquement le genre de choses à chercher dans une encyclopédie, je cherche aussi sur WP. Et là, surprise :

Là on parle de destruction volontaire, programmé, stratégiquement mise en œuvre. C’est vachment pas pareil pour moi. Et la vérité, elle se situe où ? Dois-je compter le nombre de sites qui donnent la version de l’UNESCO et le nombre de sites qui donnent la version de Wikipedia, et se dire qu’une info fausse ne résiste pas et ne peut être que mise en minorité ? Peut-on établir la vérité par le nombre ? Peut-on se satisfaire de l’idée que l’UNESCO, de par son rôle diplomatique, a voulu arrondir les angles  ?

 

Le soir du 10 mai 1981 : que reste-t-il 30 ans après ?

extrait d’ici

Vous vous souvenez de cette fête ? Des feux d’artifice (ou juste des pétards ?) ?

Moi j’avais 5 ans et j’y étais avec ma mère et ma marraine Cécile. Et vous ?

Le « tract de Villejuif » sur les additifs alimentaires : une histoire persistante !

J’ai reçu ça aujourd’hui par mail :


et ça m’a rappelé que j’avais reçu des ancêtres de ce document quand j’étais à l’école Decroly de Saint-Mandé (de 1981 à 1983), de la main à la main, en format dactylographié et photocopié à moins qu’ils ne soient ronéotypés mais je ne crois pas). Il me semble que les enfants recevaient ça de leur parents, le donnaient aux autres enfants, avec pour consigne de le donner à leurs propres parents. Chez moi, on a gardé le document longtemps, et il me semble l’avoir personnellement pris plutôt au sérieux, même des années plus tard, une fois rentrée à Istanbul, et curieuse et parlant de tout…Je pense même que mon habitude de lire les petites lignes me vient de ce document !

Il y a 5-10 ans, je me suis souvenue de cette histoire, me suis demandé si c’était du lard ou du cochon et farfouillé sur internet. On trouve cette page sur wikipedia. Avec des versions du document qui ressemble exactement à ce que j’avais en souvenir :

Et vous, quelle est votre histoire personnelle avec ce tract ?

En quelle année (approximativement) l’avez vous rencontré pour la première fois ?

Sous quel format ? Si vous l’avez gardé et pouvez me le scanner je serais la plus heureuse des historiennes-amateur !

L’avez-vous diffusé ? par mail ?

L’avez-vous reproduit ? par photocopies ? par ronéotyopage à l’alcool ?

Qu’en avez vous pensé ? Cru complètement ? Émis des doutes mais diffusé à tout hasard ? Émis des doutes mais essayé de faire attention (on sait jamais) ? Pas cru du tout ?

11 septembre 2001 : que faisiez-vous ce jour-là ?

Je devais prendre l’avion pour Istanbul en fin de journée (19h00?) avec E. J’avais pris ma journée (j’étais en thèse) ce mardi. Je ne sais plus ce qu’on a fait la matinée, à part faire nos valises. Bizarrement, on n’a pas écouté les infos (à la radio) ni parlé au téléphone avec qui que ce soit (en tout cas pas de « ça »). La nouvelle a dû tomber en Europe (UTC+1) vers 15h30, et nous avons quitté la maison vers 16h30-17h, toujours au courant de rien. Nous avons dû marcher de la Rue Lacépède jusqu’au RER Luxembourg. Les gens ne parlaient pas de ça dans le RER.C’est une fois à l’aéroport (CDG, peut-être le Terminal T9, sorte de préfabriqué dédié aux charters, appellé aujourd’hui T3, mais peut-être un terminal normal, sinon), vers 18h (11h du matin sur la côte Est des EU), qu’on a entendu les premières annonces :

Suite aux événements survenus, tous les vols sont suspendus vers les États-Unis.

Je me suis demandé de quel type d' »événement » il pouvait s’agir. J’en ai parlé à E. J’ai conclu que ça devait être des ouragans, tornades et autres catastrophes naturelles extraordinnaires dont ce continent avait l’air habitué (et qui nous paraîssent exceptionnel vu d’Europe, continent paisible). J’ai quand même trouvé ça bizarre d’appeller ça des « événements » et que ça bloque TOUS les vols.

Tout ça ne nous a pas perturbé plus que ça.

En attendant dans la salle d’embarquement, j’ai remarqué qu’on allait voyager avec toute une équipe de volley ou de baskets féminine turque (survèts, grandes tailles, etc), ça m’a fait rigoler. Je suis allé m’acheter un truc à manger, et dans le petit kiosque juste à côté de la salle d’embarquement, et c’est là que j’ai entendu la radio qui parlait de détournement d’avion et d’impact à NY (je ne sais plus le détail, mais c’était une info grave). N’ayant pas tout entendu, j’ai demandé au vendeur de quoi il s’agissait. Il m’a dit qu’un/des avion/s avaient été détournés aux États Unis et sans doute quelque chose au sujet des tours jumelles (déjà effondrées à cette heure-là ?). Incrédule, je lui ai demandé de qui il s’agissait, pourquoi, comment (comme s’il pouvait savoir ), il m’a dit qu’on pensait que c’était lié aux problèmes dans le Proche Orient, donc le conflit Israélo-Palestinien. Je me suis dit « mais oui, c’est ça, bien sûr », et je suis allé me rasseoir, pas plus inquiète ni impressionnée que ça. J’ai dû raconter ce que j’avais entendu/compris/interprété à E, en tout cas cela n’a pas été un sujet de conversation. RAS sur le vol d’une durée de 3h-3h30 : lire, dormir, manger, bavarder.

Arrivée à Istanbul entre minuit et 1h. Ma mère était venue nous chercher. Retour en bus ou en taxi, je sais plus. Elle nous a demandé si on avait entendu parler de la nouvelle, que c’était totalement hallucinant, des images et films totalement fous, des gens qui sautent par les fenêtres, des tours qui s’effondrent, du jamais vu. On a passé le voyage à poser des questions, sonnés, impatients d’en savoir et voir plus.

Une fois arrivés à la maison, on a tout de suite allumé la télé. Un petit nombre d’images tournaient en boucle. Mais on ne montrait déjà plus les gens se jettant des fenêtres. Que je n’aurais du coup jamais vu. Et qui m’auront toujours laissé un sentiment bizarre d’avoir raté quelque chose et aussi d’avoir été épargné d’un voyeurisme malsain. On s’est couché tard, super fatigués. On savait (il me semble, mais peut-être que je reconstitue) que ça allait changer la face du monde.

Et vous, me raconteriez-vous ce que vous vous souvenez de votre 11 septembre 2001 ?